Écrire pour écrire, créer pour créer
J'ai toujours eu une vision assez précise de ce que voudrait dire "faire de l'art sérieusement". Et cette vision a évolué avec les nouvelles technologies. Ça regroupait des injonctions comme "publier un roman", "avoir une chaîne Youtube avec des vidéos de chant et de danse", "être coté sur le marché de l'art", "enregistrer un album en studio avec une équipe complète", "faire grossir sa communauté Instagram"...
Que des moyens de montrer ce qu'on fait (sous contrat artistique ou dans le but d'être repéré).
Mais il faudrait peut-être créer l'art supposé être montré avant de pouvoir le montrer. Et je n'avais pas fait ce lien dans ma tête.
Je suis donc bloqué à un stade où je n'atteins pas mes rêves car mes rêves sont construits comme des bulles futures sans aucun chemin qui les relient au présent. Pour qu'ils se réalisent, il faudrait que quelqu'un me repère et me donne les conditions (aka l'autorisation) de publier ce roman, enregistrer cet album. Sauf que je ne peux pas être repéré car ma chaîne Youtube et mon compte Instagram ne sont pas actifs ou parlent très peu de mes arts. Mais je suis en dépression depuis des années et sortir le matériel pour tourner une vidéo représente souvent trop d'effort. Donc je ne fais pas d'art.
Ça me tue d'avoir eu un raisonnement si visiblement faussé pendant si longtemps.
Je faisais d'une envie "écrire" une énorme tâche importante pour mon futur et aux multiples implications. "Les choses importantes que je dois écrire, ce sont mon roman ou mes pièces de théâtre, pour lesquelles je dois être concentré et faire un travail de qualité car elles devront être publiées et contribuer à ma notoriété".
Ça en fait donc une tâche trop lourde pour mon cerveau fatigué et j'ai rarement la force de m'y mettre.
Cela a probablement contribué au fait que je n'ai plus goût à rien, comme abordé dans cet article hier.
Je commence à comprendre que j'ai le droit de faire des choses pour le plaisir et surtout dans le présent. Tant mieux si ensuite je peux les poster sur les réseaux ou les partager autrement ou les professionnaliser. Mais ce n'est pas le but. Juste un bonus.
Je ne dois pas produire du contenu pour avoir une chaîne Youtube connue, je dois chanter, jouer de la guitare, danser quand j'en ai envie.
Je ne dois pas avoir une fiction en vogue sur Wattpad pour être repéré, je dois écrire parce que ça me fait plaisir. Que ce soit un roman, une pièce de théâtre, une nouvelle, un poème, une chanson, un article de blog, un post Instagram.
Je n'ai pas besoin de comprendre le marché de l'art et savoir comment une carrière fonctionne, je dois peindre parce que c'est chouette.
Je ne dois pas avoir un business de print on demand rentable, je dois créer les jolis journaux à compléter que j'aimerais utiliser.
Je ne dois pas avoir une carrière de drag, je dois créer des numéros drag et les répéter.
Toutes les premières parties de ces phrases sont possibles mais elles ne se produiront jamais si je ne me rends pas compte que c'est la deuxième partie des phrases qui compte.
Donc j'ai fait une liste des pratiques d'art ou de création que je peux faire quand j'ai un vague sentiment de vouloir faire un truc.
La liste d'objectifs de vie ne marchait pas car "publier un album" comprend trop d'étapes, et surtout des non-créatives, pour être abordable en tant qu'activité artistique.
J'avais commencé la nouvelle liste par des catégories "5 minutes", "15 minutes" mais j'ai vite changé car ce n'est pas le temps qui me gouverne le plus, c'est mon état mental. J'ai donc 5 catégories:
- Sans réfléchir
- Choisir et suivre
- Se plonger et réfléchir léger
- Avec installation
- Se plonger et réfléchir lourd
L'ordre de "difficulté"/implication ressemble environ à ça et j'ai encore séparé chaque catégorie entre ce que je peux faire depuis mon lit et ce qui implique d'en sortir car c'est pertinent dans mon état actuel.
Dans "sans réfléchir", on retrouve par exemple écrire un article sur ce blog, car j'ai juste besoin de m'y mettre et dérouler ma pensée. Ce classement est évidemment adapté à mes capacités et mon fonctionnement et les actions ne seront pas rangées pareil pour tout le monde.
Dans "choisir et suivre", j'ai des choses comme de la mise en page (de choses déjà créées dans une autre catégorie), l'apprentissage d'une chorégraphie ou d'une chanson ou même de la lecture ou des recherches plus pragmatiques.
Chez moi, de la réflexion légère serait: écrire un script de vidéo/podcast ou une fiction sans plan, faire du scrapbooking ou créer un jeu et j'ai besoin d'une réflexion plus profonde pour: écrire un chapitre de roman ou un bout d'une pièce de théâtre, coudre un costume ou chorégraphier un numéro.
La catégorie la plus eye opening a été "avec installation". Elle contient peindre mais surtout enregistrer un podcast et filmer une vidéo chant/danse/éso/lifestyle. Que des activités qui nécessitent de sortir du lit et, à l'exception de peindre, qu'une autre action créative (un script et/ou un entraînement) ait été réalisée avant. Les actions les plus difficiles donc et celles que je voyais comme indispensables au développement de ma "carrière". Des actions compliquées actuellement et depuis longtemps. Qui donc avançaient rarement et me frustraient.
Le moyen d'expression sur internet le plus adapté à ma situation est le blog, que j'ai bêtement délaissé car il était moins à la mode. Mais il ne faut pas que je l'aborde sous un angle réseaux sociaux, en recherche de likes et de commentaires. C'est juste un moyen d'avoir les avantages du journaling (réfléchir, mettre des choses à plat) avec la joie simple de sentir mes mains courir sur le clavier et une petite sensation d'accomplissement en bonus en cliquant sur publier car j'ai fait et envoyé quelque chose de complet.
Bonus 2 si ça permet à mon conjoint de mieux me comprendre.
Bonus 3 si mes mots sont utiles à quelqu'un qui passe par là.
Il faut que j'arrive au même comportement avec les vidéos. Ce doit être un moyen de finir quelque chose et de le conserver pour future référence avec bonus si ça plaît à quelqu'un qui passe par là.
Je ne suis pas opposé à l'idée de faire un peu de promotion pour mon contenu, par exemple sur les réseaux sociaux, ou de m'appliquer un peu niveau titre/miniature selon mes connaissances sur le référencement et la communication. Mais pas maintenant. Je ne suis pas en état.
Je veux retrouver le goût de créer avant de me demander à nouveau si ça peut être une carrière.
Et je serai bien mieux armé pour en faire une carrière si j'ai créé des choses plutôt que passé mon temps à essayer de comprendre les algorithmes ou le public type d'un shop d'art sur Etsy.
Je dis ça, mais juste avant d'écrire cet article, j'ai encore cliqué sur une vidéo dans mes recommandations "Comment je gagne 3'000$ par mois en tant qu'artiste (5 flux de revenus)". C'est intriguant de savoir comment d'autres y arrivent mais ça ne doit plus m'intéresser. Je ne dois plus construire des plans dans ma tête de comment en vivre, quelle stratégie essayer, quel planning suivre.
Je dois retrouver comment vivre d'abord.
Ça implique probablement que mes études sont importantes et que je devrai trouver un vrai travail à la fin. Mais je ne veux pas trop penser à ça non plus pour l'instant.
J'ai le droit de vivre pour vivre, d'écrire pour écrire, de créer pour créer.
Je l'avais déjà compris en 2018 dans cet article sur Ma raison d’être. Compris, mais pas appliqué. Ou pas bien longtemps.
J'ai à nouveau écrit aujourd'hui. Loin de moi l'objectif d'écrire un article tous les jours. Je ne veux aucune pression. J'espère que je ne fais pas trop d'efforts trop vite. Ça m'arrive souvent lorsque j'ai l'impression d'avoir compris des choses. Il faut que la pratique suive mais souvent ce n'est pas le cas et je retombe au plus bas.
Au prochain détour
A découvrir aussi
- Si la joie c'est de sentir ses doigts bouger sur le clavier
- Bonne année 2014 (les Virgules d'Aëmell)
- Vieil à propos (les Virgules d'Aëmell)